Les
Rougier à Cancon, chez les Marcel Maillet,
année scolaire 39-40
Maurice et Marcel sont à la guerre
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Souvenirs de Granie
par elle-même:
"On
dansait sur un volcan, Maurice, du 2ème Bureau, savait depuis 6
mois le jour de l'entrée de Hitler en Pologne, on avait cru le
calmer à Münich et personne ne voulait croire à une
nouvelle guerre.
Avec le recul, cette nouvelle épreuve fut pour nous Français
moins pénible que la guerre de 14. Bien sûr, deux millions
d'hommes furent prisonniers et travaillaient en Allemagne, la zone Nord
occupée, les arrestations ( mais nous avons eu de la chance qu'arrêté
- en Nov. 42 - Maurice fut relâché ), le manque de nourriture,
la pénurie, les humiliations...
On ne peut oublier la vie des martyrs
des 1 millions1/2 qui périrent en 14 et la grippe espagnole.
J'arrive à 100.000 soldats Mai-Juin 40, 160.000 dans les chambres
à gaz, 50.000? à la Libération dans la guerre civile
de la milice et la résistance ( ceci d'après Raymond ARON
)
La vie continua tant
bien que mal, .....
Granie - févr 89 - "
"Souvenirs de Claude"
".....La
garnison suivante fut Dijon.
En Sept. 39, à la déclaration de guerre, il fut
décidé que les meubles seraient en garde-meubles et
que, nous les enfants, irions nous "réfugier" avec Maman chez
Tante Cécile qui habitait à Cancon
(Lot-et-Garonne) (voir
la carte du
5 eptembre 39, de Marguerite Maillet, écrite de Cancon,
et adressée à Suzanne pour lui dire qu'elle peut venir
se réfugier à Cancon avec Fanny et Claude) -
oncle Marcel était ingénieur entrepreneur pour une société
qui posait des poteaux de lignes électriques- c'était
un univers de femmes - puisque ma grand-mère maternelle y était
aussi - Tandrée mobilisée comme infirmière, et
l'atmosphère était souvent pleine de nervosité…Après
la drôle de guerre (entre le 10 mai et le 25 juin 40) mon père
revint désespéré par ce désastre où
les soldats fuyaient et désertaient en masse.
Souvenirs de Marguerite
MAILLET, la grand-mère de Claude:
" fin Août
1939 -
A peine rentrée de Dampierre
où nous avons passé les vacances en famille: Etienne
et ses enfants, Suzanne et Maurice, Fanny et Claude, tous très
gaiement, mais l'orage monte et Maurice est parti rejoindre son régiment.
La guerre menace et malgré
cela Marcel arrive à Sceaux avec sa femme et sa petite Colette.
Lui n'y croit pas, bien entendu. Mais j'entends des échos de
TSF et sur la place de l'église en particulier, un discours
de DALADIER qui ne laisse guère d'espoir.
Il est décidé que
je pars avec eux à Cancon.
Andrée est appelée comme infirmière et je ne
me sens pas le courage de vivre seule ici dans un moment pareil. Encore
une guerre…Celle de 14 n'est pas loin pourtant!
Nous faisons un voyage très
fatigant, train bondé et parti à 9 heures du soir de
Paris, nous ne sommes à Villeneuve
que le lendemain soir vers 7 heures. Les CERENOZ nous offrent à
dîner, je n'en puis plus…
Inquiétudes, soucis, Marcel
part au bout de quelques jours et nous voilà seules, Cécile
et moi, pour longtemps.
La bonne petite Colette est le
rayon de soleil, son charme d'enfant me console bien des fois.
Je pense à Andrée,
perdue seule dans un hôpital. Sa santé résistera-t-elle?
Et Suzanne, seule aussi
vient nous retrouver avec ses deux filles. Quelle minute émouvante
que cette arrivée. Elle a mis ses meubles en garde-meuble et
donné congé de son appartement, son mari exposé…
Que de chagrins.
Le temps passe cependant: les trois
petites filles vont à l'école du village et nous nous
occupons de la maison, cuisine, tricot, lettres aux absents.
J'ai appris que ma maison est occupée
par des officiers et une popote, mais c'est l'indifférence,
il y a tant d'autres sujets de peine."""
"""Le lundi 17
juin 1940,nous déjeunions dans le grand vestibule de Cancon,
au nombre de 21 personnes, puisque la famille de Cécile était
arrivée le samedi précédent, 14 personnes, et
qu'André de Lille nous
était tombé du ciel le dimanche - quand on entend la
TSF chez nos voisines - Suzanne et Ray. MALET vont écouter
et nous restons à nos places. Mais ils reviennent la figure
bouleversée, nous disant que le Maréchal Pétain
demande l'armistice ?.. Nous n'y croyions pas tant cette nouvelle
était inattendue. On nous avait dit tant et tant de fois que
la victoire était à nous!..
Le soir, malheureusement, nous
avions la confirmation de cette terrible nouvelle et l'angoisse a
commencé. Les jours se succédant sans nouvelles des
nôtres, les postes et les trains étant arrêtés,
et l'avance allemande continuant. Nous avions La Petite Gironde comme
journal et les émissions de la TSF plusieurs fois par jour.
Quelle tristesse et cette attente
énervante avec tous les faux bruits qui circulent. Pour comble
de malheur, il pleut, il pleut - brume à l'horizon et rien
de consolant, car on s'attend au pire.
Les réfugiés continuent
et l'armée s'y ajoute. Quel branle-bas dans ce pauvre Cancon,
si calme d'ordinaire…
25
Juin - On annonce que les conditions de paix seront connues dans 48
heures - toujours attendre - Mais à la Poste, j'ai deux cartes
d'Andrée, dont la dernière du 20 Juin, et elle est à
Castres - donc elle est
sauvée - et se dit en bonne santé, et à midi,
Maurice nous arrive en surprise. Il est tout près d'ici et
passe 2 heures avec nous!.. Il va bien, mais qu'il est malheureux
de cet échec…Il a fait toute la campagne depuis Sedan,
l'Oise, Amiens et la Loire, et nous ne le savions pas…
Les nouvelles de Marcel arrivent
les dernières, il a fait plus de 600 Km. en retraite, - et
quelques jours après il arrive en surprise aussi, très
bruni et maigri. Les voilà donc sauvés tous les trois
et j'en remercie le Bon Dieu, mais notre chère France!
Quelle tristesse profonde et comment s'en relever.
Septembre
- Nous avons quitté Cancon, Suzanne, les filles et moi
pour aller à Valence
revoir Etienne et ses enfants. - Mais quel voyage! . A
Tarascon, nous trouvons un hôtel où nous nous reposons
- et nous arrivons à Valence dans l'après-midi. Quelle
émotion de revoir les enfants et les parents! . nous passerons
un mois avec eux, car on ne sait plus quand on se reverra. La ligne
de démarcation est au-dessus de Lyon et on ne passe qu'avec
des visas compliqués. Les lettres ne passent pas et je ne puis
prévenir ma sœur qui est à Sceaux, ni rien recevoir
d'elle.
Octobre
40 - Nous profitons d'un retour de réfugiés qui nous
ramène à Paris gratis - mais quel voyage! Partis
à 8 heures de chez Etienne, le départ n'a lieu qu'à
11 heures; Nous sommes à Chalon-sur-Saône
à la nuit, et on nous fait attendre jusqu'au lendemain. Par
un détour énorme, Troyes et la suite, nous arrivons
à la gare de l'Est à 9 heures du soir; Je n'en puis
plus! Andrée heureusement nous trouve une chambre, que nous
partageons avec une dame qui a voyagé avec nous, et le lendemain
nous arrivons enfin à Sceaux!.. Quelle émotion, nous
avons cru notre maison occupée, mais les bonnes demoiselles
Philippeau nous ont préservé en ouvrant nos fenêtres
et nous voilà chez nous!. Les provisions sont rares, on ne
trouve pas grand chose…Je ne sais comment nous avons vécu cet
hiver-là. Après une quinzaine, on nous permet les cartes
où on met à peine quelques mots."""
Cancon, année scolaire 39-40
La famille Rougier s'est repliée
pendant la "Drôle de Guerre" à Cancon,
petite bourgade perdue du Lot-et-Garonne, c'est du moins ce qu'en
a retenu Claude, avec le souvenir d'une maîtresse d'école
difficile mais semble-t-il efficace (Madame Papou).
Ils étaient hébergés avec Bonne-Maman
de Sceaux, chez Marcel Maillet, un frère de Granie.
Maurice Rougier et Marcel Maillet étaient mobilisés
aux armées, et il n'y avait donc que des femmesà
Cancon :
Cécile et sa fille Colette, née
en 35, Marguerite Maillet, Granie, Fanny et Claude.

(détails)
Fanny et Claude, Noël 39

(détails)
Tandrée, en permission, en uniforme d'infirmière, et ses 2 nièces
Fanny et Claude Rougier

(détails)
Claude, Colette et Fanny, déguisées

(détails)
Colette

(détails)
printemps 40, Claude, Colette et Fanny

(détails)
Tandrée et Colette

(détails)
Tandrée
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(détails)
Grand-Père venu en permission fin mars 1940
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Lettre
d'une amie dijonnaise qui habitait le même immeuble que les Rougier à
Dijon, et qui devait s'occuper des affaires des Rougier, restées à
Dijon quand ils sont partis à Cancon.
(pour dater les évènements,
se rappeler que le 7 juin, les Belges (le Roi Léopold) avaient capitulé
depuis 10 jours, et que les Allemands avancaient sur Rouen et allaient prendre
Paris le 14 juin) 
| "7
Place Auguste Dubois, le 7 juin 1940 Chère Madame,
Excusez mon
grand retard à vous répondre, en réalité je n'attendais
pas votre lettre plus tôt, je supposais que j'aurais un jour l'avis de la
réception de la bicyclette de M. Rougier et je ne m'inquiétais pas. Je
n'ai aucun débours auprès de la maison Martelet, on me l'aurait
demandé que j'aurais acquiécé de suite, mais je n'ai même
pas pensé à offrir un paiement. Je ne connais pas du tout le montant
de la dépense. Tranquilisez vous, cette somme sera ajoutée à
vos différents frais.
Comment allez-vous, chère Madame? Votre
santé est-elle tout à fait rétablie? Comment vont les petites? Si
elles étaient encore dijonnaises, elles ne seraient plus écolières
depuis la semaine qui a suivi la Pentecôte: les alertes étaient si
nombreuses que les élèves passaient la majeure partie de leur temps
dans les abris; aussi toutes les classes ont été supprimées
au lycée sauf celles de préparation au baccalauréat. Vous
êtes, je l'espère, plus tranquilles à Cancon; dans un seul
jour - 24 heures - nous avons eu 9 alertes, le lendemain et le surlendemain elles
ont été moins nombreuses, puis elles ont cessé pour reprendre
15 jours plus tard, beaucoup moins fréquentes, il est vrai. | Jusqu'ici
la vie a tout de même été possible à Dijon où
des bombes n'ont été lancées que sur des objectifs militaires,
mais la course précipitée dans les caves abris au milieu de la nuit
n'est pas intéressante surtout avec des enfants. Nous nous rendons dans
la rue Audra, nous avons bien dans les caves du 7 beaucoup de couches de béton
superposées, mais à l'endroit de la cage de l'ascenseur, il n'y
a aucune résistance. Heureusement que notre abri n'est pas éloigné
et que c'est la bonne saison. Que de choses se sont passées depuis
notre séparation, et quelles choses! Dans l'esprit de chacun, Hitler
était le monstre achevé, il a fallu un Léopold (le
Roi des Belges, qui a capitulé, ce que les Français n'ont pas supporté)
pour le surpasser. Quelle honte! et en France combien de grands chefs n'ont pas
été à la hauteur de leur tâche! Avez vous toujours
de bonnes nouvelles de M. Rougier ?(c'est bien peu probable...).
Nous l'espérons. Vous ai-je dit que le Comte de Clavières était
mort au Champ d'Honneur. La colonelle Bourdier est à Lourdes pour 4 mois,
la famille Bur est à Talant, votre appartement n'est toujours pas occupé,
aucune nouvelle de madame Thomas depuis le début de la guerre, vous voyez
combien la maison est peu habitée.
Nos neveux sont-ils encore tous
en bonne santé. A chaque instant du jour, nous nous interrogeons anxieusement,
l'un d'eux et très probablement 2 d'entre eux sont actuellement dans l'horrible
mélée. Malgré tout, notre entière confiance persiste
en une victoire certaine et nous espérons que l'hiver prochain nous serons
beaucoup plus tranquilles. Avons nous raison? Chère Madame, acceptez
tous nos voeux pour le Commandant. Nous embrassons bien affectueusement les petites
et nous vous adressons ainsi qu'à Madame votre mère nos meilleurs
compliments A. Leneuf |
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